Le pouvoir de la collecte de fonds communautaire 

Suzanne Reisler Litwin est née et a grandi à Montréal. Elle est maman et enseignante à l’Université Concordia au département de l’éducation permanente. Elle donne également des cours de création littéraire au Centre Cumming. Elle organise des ateliers d’écriture créative en fonction des besoins et rédige une chronique bimensuelle dans le journal The Suburban

FRDJ a récemment eu l’occasion de s’entretenir avec Suzanne au sujet de ses plus de 40 années de collecte de fonds pour l’organisation ainsi que de ses espoirs pour l’avenir. 

FRDJ : Racontez-nous votre parcours chez FRDJ et les raisons pour lesquelles vous êtes si engagée dans cette cause depuis tant d’années. 

Suzanne : Tout a commencé il y a 43 ans, lorsque j’avais 18 ans, en 1981. Je crois qu’à l’âge de 17 ans, j’avais un petit faible pour le frère de Jimmy Garfinkle, David (les deux frères sont atteints de diabète de type 1 et membres des familles fondatrices de FRDJ à Montréal). Alors, lorsqu’il m’a demandé de participer à un événement à vélo (le Cyclothon, l’un des premiers événements de collecte de fonds de FRDJ), j’ai accepté. Des amies ont participé avec moi, nous voulions toutes aider et soutenir la communauté du diabète de type 1 (DT1). La formule était fortement axée sur le volet communautaire. On faisait du porte-à-porte pour solliciter des dons. Il s’agissait d’un parcours à vélo de 50 km, et les gens donnaient 10 ou 25 sous par kilomètre. Nous avions des formulaires de collecte de fonds, et une fois l’événement terminé, nous retournions voir les donateurs pour recueillir les fonds promis. Tout était en pièces de monnaie et en dollars. Je devais aller à la banque, rouler les pièces de monnaie et faire un chèque pour remettre les fonds à la Fondation. 

Quant à moi et David? David et moi n’étions pas faits l’un pour l’autre. Mais j’ai fini par épouser le meilleur ami de Jimmy, et nous sommes restés très proches, élevant nos enfants ensemble et restant des amis pour toujours. 

Pour moi, c’était amusant d’amasser des fonds pour cet événement à vélo. Un donateur a offert un dollar par kilomètre parcouru. C’était incroyable! La première année, j’ai recueilli environ 100 $, puis un peu plus, et quelques années plus tard, j’ai amassé la somme de 1 000 $ et ainsi, j’ai accédé au statut de cycliste VIP. Cela nous a permis de disposer d’une tente réservée aux cyclistes VIP. Le Cyclothon était tenu à Hampstead, mais il a fallu trouver un autre endroit parce que l’événement prenait trop d’ampleur. Nous pédalions sur un parcours de 5 km, et nous le faisions 10 fois en traversant la ville de Montréal. 

C’est également à ce moment-là que l’on m’a donné plus d’outils pour joindre un plus grand nombre de personnes qui avaient déjà fait un don pour m’appuyer. J’ai donc commencé à envoyer des lettres à mes donateurs en 1987. L’organisation portait le nom de Fondation du diabète juvénile à cette époque. On m’a donné du papier à en-tête de la Fondation, j’ai composé un message personnalisé et on a imprimé le tout. Tout était fait à la main, le numérique n’existait pas encore. Je ne m’en suis pas rendue compte à l’époque, mais ces 20 à 25 lettres allaient devenir la pierre angulaire de mes collectes de fonds. 

Ces lettres de demande de dons pour la Fondation ont d’abord permis d’amasser 2 000 $, puis 3 000 $ et ensuite, 4 000 $. C’est alors que j’ai décidé d’ajouter un peu de créativité. J’ai pensé que la meilleure façon d’obtenir des fonds était d’offrir un « cadeau » ou un « cadeau avec achat ». En 1997, j’ai composé un rap, en 1998 j’ai composé un chant de ralliement et en 1999 j’ai envoyé un sou noir, symbole porte-bonheur de notre équipe. J’ai donné un sou à tout le monde dans l’espoir d’amasser plus de fonds, et l’année d’après, j’ai envoyé une pièce de 5 sous. Ensuite, j’ai commencé à donner des articles du magasin à 1 $, notamment, un miroir pour notre thème « Miroir, miroir sur le mur… », et j’ai demandé aux donateurs de se regarder dans le miroir et de voir une fructueuse collecte de fonds. 

Pour mon 20e anniversaire de collecte de fonds pour FRDJ, j’ai envoyé une invitation à un anniversaire de mariage. Les années suivantes, j’ai envoyé des cartes de jeu de blackjack, des billets de loterie, des Post-it, et toutes sortes d’objets plats, légers et peu dispendieux qui peuvent être insérés dans une enveloppe. Les gens ont commencé à avoir hâte de connaître le prochain thème. On me parlait à l’épicerie et on me demandait quel était le thème de cette année. 

En 2004, nous avons délaissé l’événement à vélo pour participer à la Marche (Marche pour la guérison du diabète FRDJ). La météo avait été épouvantable lors du parcours à vélo quatre années de suite. Il pleuvait, il neigeait, les gens étaient frigorifiés. Le Cyclothon avait lieu en mai, à un moment où la température peut être encore capricieuse à Montréal. Nous en avons parlé et nous avons réfléchi, car il devait certainement y avoir un meilleur moyen. C’est là que nous avons opté pour la Marche (qui a lieu en juin). 

C’est à cette époque que j’ai commencé à penser à des thèmes pour les collectes de fonds annuelles, puis en 2013, je me suis tournée vers les médias numériques. J’ai eu la chance de travailler avec des graphistes très talentueux. À mes 50 ans, le thème fut « 50 nuances de Suzie ». Le cadeau qui accompagnait la lettre était une pièce de 50 sous! À ce stade, toutes mes lettres de demande de dons et mes collectes de fonds sont passées à l’ère numérique, permettant de recueillir 15 000 $ et ensuite, 20 000 $, puis 25 000 $. Les sommes recueillies demeuraient à ce niveau sur une base constante, et tout le monde recevait encore un cadeau. Les thèmes des campagnes devenaient encore plus divertissants, ce qui suscitait de la curiosité. 

Aujourd’hui, j’envoie un maximum de 250 lettres de demande de dons. C’est juste assez pour que je puisse maintenir les coûts à un niveau bas, tout en recueillant un montant quand même important. (Note de FRDJ) : Suzanne ne facture rien à FRDJ et tout est payé de sa poche). 

Après la pandémie, j’ai pris conscience de la force des médias sociaux et de leur pouvoir. Grâce aux médias sociaux, je pouvais générer des interactions avec mes donateurs et avec des abonnés qui me suivent. Je pense que c’était en 2022, j’apprenais tout juste à faire ces choses, tout ça était assez nouveau pour moi, vous savez! Une photo de moi a été retouchée en Rosie la riveteuse. Au lieu de dire « Nous pouvons le faire! », on a écrit : « Nous pouvons trouver une guérison! » Nous avons envoyé un bandana rouge à nos donateurs et leur avons demandé de prendre une photo en le portant et en brandissant le poing comme elle! Les photos ont été publiées partout sur les réseaux sociaux. C’est à ce moment-là que la campagne a vivement attiré l’attention. Les gens me demandaient un bandana. Nous avions tellement de photos de personnes, de bébés, d’enfants et de chiens qui imitaient le look de Rosie la riveteuse. Nous avons recueilli beaucoup de fonds pendant cette campagne et j’ai vu le pouvoir des médias sociaux et des interactions. Les gens voulaient participer à cette collecte de fonds! Si quelqu’un me demandait un bandana, je disais OK, mais en échange d’un don pour FRDJ. 

L’année dernière (2023), nous avons envoyé des lunettes rondes et colorées inspirées des années 1960 à nos donateurs dans le cadre de notre thème groovy. La campagne a suscité un vif intérêt, de la curiosité et une incroyable participation. Nous avons recueilli plus de 44 000 $ dans notre aventure de collecte de fonds pour FRDJ! 

Cette année (2024), nous avons envoyé de gros colliers en or avec des brillants et des plumes. Notre thème est « Viva Las Curas » (Vive la guérison), qui s’inspire du glamour et des spectacles à Las Vegas. Cette année, j’ai dû réfléchir sérieusement à la manière dont j’allais faire le lien entre Vegas et une guérison pour le diabète. Le développement du concept a pris des mois, qu’allions-nous envoyer et comment? Nous avons finalement opté pour les plumes et Viva Las Curas

Jusqu’à présent, tout va bon train. Je reçois des photos de Viva Las Curas et nous sommes sur la bonne voie. Chaque mois, je dois recueillir environ un tiers de mon objectif total avant la Marche. Je pense qu’il y a de bonnes chances de recueillir près de 50 000 $. Nous espérons que tout le monde y participera. C’est avant tout pour la communauté du DT1, et pour nous amuser en amassant des fonds. Il s’agit également de sensibiliser les gens et de les aider à mieux connaître le DT1 et son impact sur les personnes qui en sont atteintes. 

Mais je dois insister sur le fait que je ne fais pas cela toute seule. J’ai une équipe de personnes qui travaillent avec moi chaque année. D’excellents imprimeurs, graphistes, artistes, amis et membres de la famille. Nous nous rassemblons chaque année pour réfléchir à la manière dont nous pourrons recommencer, et faire encore mieux l’année prochaine. Les membres du personnel de FRDJ, mes amis, sont les personnes les plus extraordinaires avec lesquelles travailler. FRDJ et son personnel sont tout simplement les plus FORMIDABLES et les MEILLEURS! Nous ne pourrions pas faire ce que nous faisons sans cette organisation et ces personnes extraordinaires. 

Même ma mère, qui aura bientôt 90 ans, participe activement à l’ensemble du processus. C’est une affaire de famille, et c’est devenu une très grande partie de ma vie, de nos vies.  

Il ne s’agit pas seulement d’une campagne de collecte de fonds, ça fait partie de moi. J’ai deux sentiments personnels à ce sujet. D’abord, j’aime terminer tout ce que je commence dans ma vie. J’ai commencé quelque chose, et je n’ai pas terminé, alors je continue. L’autre est ma quête personnelle. Si cela devait arriver, c’est-à-dire, une guérison pour le DT1, de mon vivant, nous, notre équipe, ferions partie de ce succès. Que mon passage sur Terre soit utile, non seulement pour ma famille et ma carrière, mais aussi pour l’humanité. Je ne renoncerai jamais à la possibilité d’un succès révolutionnaire dans le domaine du DT1. Même si cela ne se produit pas de mon vivant, je peux me rassurer, sachant que nous avons essayé, au cours de ma vie, de changer la trajectoire de l’humanité, et que nous n’avons jamais abandonné. 

Lorsque je vois des personnes utiliser leur glucomètre continu (un dispositif qui mesure la glycémie en continu chez les personnes atteintes de diabète), j’ai le sentiment que nous y avons contribué. Non nobis solum, du latin qui signifie pas seulement pour nous. Pas seulement pour nous, pour tout le monde. Nous vivons notre vie pour nous, pour nos proches. Je vous demande : quelle marque laisserez-vous dans ce monde? C’est l’occasion de faire quelque chose qui pourrait changer des vies. Pour cela, nous n’abandonnerons jamais. Je pense qu’une percée sera bientôt réalisée (en ce qui concerne les thérapies de guérison pour le DT1). Si ce n’est pas de mon vivant, ce sera peut-être de celui de mes enfants. C’est une chance inouïe qui nous tient à cœur et pour laquelle nous travaillons. 

FRDJ me donne presque carte blanche pour faire ce que je veux. D’autres organisations n’offrent pas ce type de liberté. Je partage le thème de ma campagne avec mes collègues de FRDJ, j’obtiens le feu vert et je laisse libre cours à ma créativité. On part ensuite avec ça. Nous nous faisons confiance. 

Pouvoir continuer à le faire année après année est un cadeau pour moi. J’adore ça! C’est une formidable période de créativité pour moi. La Marche rassemble les gens dans une atmosphère de gaieté. Cette année, beaucoup plus de personnes me demandent de se joindre à notre équipe Suzie’s Sweethearts dans le cadre du thème showgirls et showguys de Vegas. Nous porterons tous des T-shirts spéciaux et des plumes lors de la Marche en juin. 

Cette année, nous donnerons nos plumes et nos colliers à des enfants sur notre route de la Marche. À la fin du parcours, nous n’avons généralement plus ce que nous avions au départ, car nous partageons la joie en marchant pour guérir le DT1.  

Après la Marche, les membres de l’équipe Suzie’s Sweethearts se retrouvent chez moi pour se détendre et célébrer notre réussite. Ensuite, je me couche vers 15 h et je dors pendant des heures d’un sommeil des plus sereins. Lorsque je me réveille, j’ai l’habitude de me dire : « Bon, qu’est-ce qu’on fait ensuite? » 

D’autres organisations ont essayé d’attirer les membres de l’équipe en leur disant : « Vous avez tellement fait pour FRDJ, vous pourriez le faire pour nous une année. »  

Mais je reviens toujours à la promesse initiale que j’ai faite à Jimmy et à David : tant que vous vivrez avec le diabète, nous continuerons. Je me suis engagée envers eux et ils se sont engagés envers moi. Malheureusement, la communauté des personnes atteintes de DT1 s’agrandit, alors nous ne pouvons pas nous arrêter maintenant, nous ne devons pas nous arrêter! 

Notre collecte de fonds s’étend sur environ 10 mois de l’année, c’est un travail constant. Je prends le mois de juillet de congé après la Marche. En août, nous envoyons des lettres de remerciement vraiment extraordinaires à nos donateurs. Le processus reprend ensuite en septembre et en octobre pour trouver le prochain thème, les slogans, les cadeaux et les images pour rester sur notre lancée. (Nous avons une idée pour 2025 😉) 

Nous continuerons jusqu’au jour où nous trouverons des thérapies de guérison pour le DT1, comme je l’ai promis à Jimmy et à David. 

Si vous souhaitez soutenir la campagne Viva Las Curas, veuillez suivre ce lien : https://jdrf.akaraisin.com/ui/24frdjmarche/p/suzanne 

Pour participer à la Marche pour la guérison du diabète FRDJ, ou y faire du bénévolat : https://frdjmarche.ca/ 

Pour recevoir notre trousse de lettres de demande de dons Viva Las Curas, écrivez-nous à : Suzanne@suzannereislerlitwin.com 

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